Siège de la Somaïr à Niamey/ AP
Le jeudi 19 juin 2025, la junte militaire au pouvoir au Niger a annoncé la nationalisation de la Société des mines de l’Aïr (Somaïr), une filiale du géant français de l’uranium, Orano. Cette décision intervient après plusieurs mois de tensions croissantes entre Niamey et Paris, exacerbées par le coup d’État qui a renversé le président Mohamed Bazoum en juillet 2023.
Contexte de la nationalisation
La nationalisation de la Somaïr est présentée par les autorités nigériennes comme une réponse au « comportement irresponsable, illégal et déloyal » d’Orano, qu’elles qualifient d’« État ouvertement hostile au Niger ». Selon la télévision nationale RTN, cette nationalisation implique que toutes les actions et le patrimoine de la Somaïr sont désormais transférés en pleine propriété à l’État du Niger. Les détenteurs d’actions de la société bénéficieront d’une indemnité de compensation, bien que les détails de cette compensation n’aient pas été précisés.
Griefs contre Orano
Le gouvernement nigérien a énuméré plusieurs griefs à l’encontre d’Orano, notamment le non-respect des règles de partage des bénéfices convenues dans leur entente. Niamey accuse également la société française d’avoir exporté plus que sa part et d’avoir arrêté les travaux d’exploitation à la Somaïr depuis le 26 juillet 2023. D’autres points de discorde incluent le rapatriement sans préavis de ressortissants français et la déconnexion du système informatique de la Somaïr du réseau global d’Orano.
Un autre sujet de préoccupation a été la tentative d’Orano de revendre ses parts dans la Somaïr, une information révélée par le Financial Times mi-mai. Orano avait alors déclaré que les parties étaient libres de soumettre des offres si elles le souhaitaient, sans mentionner le stock de plus de 1 000 tonnes d’uranium conservé sur les sites de la Somaïr, évalué à environ 250 millions d’euros.
Perte de contrôle et arbitrage
En décembre dernier, Orano avait reconnu avoir perdu le contrôle opérationnel de ses trois filiales minières au Niger, y compris la Somaïr. Bien que le groupe français reste majoritaire avec plus de 60 % dans ces filiales, il a engagé plusieurs procédures d’arbitrage international contre l’État du Niger en raison de cette situation.
Réactions d’Orano
Contactée pour commenter cette décision, Orano n’a pas souhaité faire de déclaration. Dans un communiqué publié mi-mai, la société avait exprimé son inquiétude concernant l’arrestation de son directeur, toujours détenu après une perquisition dans les bureaux de la société par les forces de sécurité. Lors de cette perquisition, du matériel informatique et des téléphones portables avaient été saisis. Orano a également signalé des difficultés d’accès à ses locaux à Niamey.
La nationalisation de la Somaïr marque une étape significative dans les relations entre le Niger et la France, illustrant les tensions croissantes dans le secteur minier et les enjeux géopolitiques en jeu. Alors que le Niger cherche à affirmer son contrôle sur ses ressources naturelles, l’avenir des opérations d’Orano dans le pays reste incertain.
Thom Biakpa