Mamadou Gassama, lors d’une intervention à l’hémicycle malien/ photo: aBamako.com
Le 2 juillet 2025, la capitale économique ivoirienne a été le théâtre d’un événement qui pourrait raviver des tensions diplomatiques déjà palpables entre la Côte d’Ivoire et le Mali : l’arrestation de Mamadou Awa Gassama, un acteur influent de la scène politique malienne et critique virulent du gouvernement ivoirien. Ce membre du Conseil National de Transition (CNT), qui se rendait à Séguéla, dans le nord-ouest de la Côte d’Ivoire, a été arrêté dans des circonstances encore floues et placé sous mandat de dépôt.
Un acteur politique de longue date, au cœur des enjeux maliens
Mamadou Awa Gassama n’est pas un inconnu dans le paysage politique malien. Ancien député de la région de Kayes, il a marqué la scène politique locale à plusieurs reprises, représentant l’Union pour la République et la Démocratie (URD), un parti fondé par le défunt Soumaïla Cissé. Son parcours s’inscrit dans une trajectoire de militantisme et de défense des intérêts de son pays, même si ses positions ont parfois été perçues comme controversées.
Depuis la chute du régime civil en 2021 et la prise du pouvoir par la junte militaire, Gassamaa su se faire une place au sein du nouveau paysage politique malien. Il a été nommé au Conseil National de Transition, l’organe législatif mis en place par les militaires pour gérer la transition. Son rôle et ses prises de position lui ont valu une certaine influence, mais aussi des critiques, notamment de la part de ses détracteurs ivoiriens.
Une visite à Séguéla et une arrestation mystérieuse
Ce mardi, alors qu’il se trouvait à Abidjan, Mamadou Awa Gassama se préparait à poursuivre son voyage vers Séguéla une ville au nord de la Côte d’Ivoire, où il devait assister aux funérailles d’un proche. C’est dans la capitale économique ivoirienne que son arrestation a eu lieu, dans des circonstances qui restent encore à éclaircir. Selon nos sources, il aurait été arrêté pour « outrage, incitation à la haine et déstabilisation des institutions », des accusations graves qui témoignent de la tension croissante entre les deux pays.
Un critique acerbe de la Côte d’Ivoire
Gassama n’a jamais caché ses positions critiques envers la Côte d’Ivoire. Proche des autorités militaires maliennes, il s’est illustré ces derniers mois par des déclarations virulentes contre Abidjan, notamment suite au retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en janvier dernier. Sur les réseaux sociaux, il dénonçait ce qu’il qualifiait d’« ingérence déguisée » de la part d’Abidjan dans les affaires souveraines des États ouest-africains, dénonçant ce qu’il percevait comme un double jeu de certains dirigeants.
Ses prises de position ont alimenté la polémique, renforçant la fracture diplomatique entre Bamako et Abidjan. La Côte d’Ivoire, qui a déjà connu des épisodes tendus avec le Mali, notamment en juillet 2022 lorsque 49 soldats ivoiriens en mission au Mali avaient été arrêtés puis libérés après plusieurs mois de détention, voit dans cette arrestation une nouvelle étape dans une série de différends non résolus.
Une mémoire douloureuse et des réactions mitigées
L’histoire entre les deux nations est marquée par des épisodes douloureux. La détention des soldats ivoiriens à Bamako en 2022-2023 reste encore vive dans les mémoires, alimentant la méfiance et la suspicion mutuelle. Pour l’instant, les autorités ivoiriennes gardent le silence, aucune déclaration officielle n’ayant été faite à ce sujet. Cependant, à Bamako, certains proches de la junte dénoncent une provocation et réclament la libération immédiate de Gassama, qualifiant son arrestation de manœuvre politique.
Une situation qui pourrait faire évoluer la diplomatie ou exacerber les tensions
Ce nouvel épisode intervient dans un contexte déjà fragile, où la stabilité régionale est mise à rude épreuve par des enjeux politiques, sécuritaires et diplomatiques. La communauté internationale suit avec attention cette affaire, qui pourrait avoir des répercussions importantes sur la coopération entre les deux pays et sur la stabilité de la région ouest-africaine dans son ensemble.
Thom Biakp