Dix personnes, principalement des femmes et des enfants d’agriculteurs, ont été enlevées lundi soir dans un village de l’État de Kwara, dans l’ouest du Nigeria. Cette nouvelle attaque, survenue une semaine après l’enlèvement de 35 habitants dans une localité voisine, depuis libérés, s’inscrit dans une recrudescence inquiétante d’enlèvements de masse qui frappent les zones rurales du pays.
Une chasse à l’homme lancée dans les forêts de Kwara
Selon le commissaire de police Ojo, l’attaque s’est produite vers 19 heures, peu après la tombée de la nuit. Une femme a réussi à s’échapper et à regagner le village pour alerter les autorités.
Immédiatement, une vaste opération de recherche a été lancée : policiers et chasseurs locaux ratissent désormais la brousse à la poursuite des ravisseurs.
Face à la gravité de la situation, le président Bola Tinubu a ordonné le déploiement d’un cordon de sécurité autour des forêts de l’État de Kwara. L’armée de l’air, sur instruction de la présidence, doit assurer une surveillance aérienne continue, y compris dans les zones les plus difficiles d’accès, afin de localiser les kidnappeurs.
Une vague d’enlèvements à travers le pays
Le rapt de lundi n’est que le dernier épisode d’une série noire. La semaine précédente, plus de 300 élèves et enseignants avaient été enlevés dans une école catholique à Papiri, dans l’État du Niger. Dans le même laps de temps, 25 lycéennes ont été capturées dans l’État de Kebbi, et 13 jeunes filles dans celui de Borno.
Depuis plus de dix ans, le Nigeria fait face à une épidémie d’enlèvements de masse. Le rapt des 300 lycéennes de Chibok en 2014 reste l’un des symboles les plus marquants de cette violence. Aujourd’hui encore, des centaines d’enlèvements sont recensés chaque année, particulièrement dans les zones peu surveillées du nord et du centre du pays.
Selon Nnamdi Obasi, analyste à l’International Crisis Group, entre 3 600 et 7 500 enlèvements par an ont été enregistrés entre 2022 et 2024, un phénomène attribué à l’action conjointe de groupes criminels, de milices locales et d’organisations jihadistes.
Le pays sous pression alors que les tensions diplomatiques montent
Cette flambée de violences intervient dans un contexte international tendu. L’ancien président américain Donald Trump a récemment menacé d’une intervention militaire au Nigeria, accusant les autorités de ne pas protéger les chrétiens visés par des groupes armés islamistes. Des déclarations qui ont ravivé les critiques sur la gestion sécuritaire du pays.
Les « bandits », principal moteur des enlèvements contre rançon
Le nord-ouest du Nigeria est particulièrement touché par les agissements de groupes armés connus sous le nom de « bandits ». Selon l’Institut des Nations unies pour la recherche sur le désarmement (Unidir), ces groupes peuvent compter de quelques dizaines à plusieurs milliers de membres.
Ils mènent régulièrement des raids dans les villages, pillent le bétail et enlèvent des civils contre rançon, avec des demandes s’élevant de quelques centaines à plusieurs dizaines de milliers de dollars par otage. Certains captifs sont libérés rapidement, d’autres après plusieurs semaines voire plusieurs mois, tandis que quelques-uns s’échappent par leurs propres moyens.
Ce phénomène trouve notamment ses racines dans les conflits récurrents entre éleveurs et agriculteurs, exacerbés par l’afflux d’armes et l’instabilité du Sahel depuis 2011.
Des forces de sécurité insuffisantes pour un pays de 230 millions d’habitants
Avec une population d’environ 230 millions d’habitants, le Nigeria ne dispose que d’environ 370 000 policiers, un effectif jugé largement insuffisant face à l’ampleur de la menace. Jusqu’à récemment, près d’un quart de ces agents étaient affectés à la protection des personnalités politiques, au détriment de la sécurité générale.
Le président Tinubu a annoncé dimanche soir la réaffectation immédiate de ces policiers à des missions de terrain, espérant ainsi renforcer la capacité de l’État à faire face aux attaques et à restaurer la sécurité dans les régions les plus exposées.
Thom Biakpa




