La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a réaffirmé lundi à Bissau sa condamnation ferme du coup d’État militaire survenu le 26 novembre en Guinée-Bissau. Lors d’une rencontre avec les auteurs du putsch, la délégation ouest-africaine a exigé le rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel et la reprise du processus électoral interrompu à la veille de l’annonce prévue des résultats de la présidentielle et des législatives.
Une mission diplomatique sous tension
Conduite par le président sierra-léonais Julius Maada Bio, actuel président en exercice de la Cedeao, la délégation a rencontré la junte dirigée par le général Horta N’Tam.
À l’issue des discussions, présentées comme « productives » par les deux parties, le ministre sierra-léonais des Affaires étrangères, Alhaji Musa Timothy Kabba, a rappelé l’exigence de l’organisation régionale : permettre au processus électoral de « parvenir à sa conclusion logique ». La Guinée-Bissau reste suspendue de tous les organes décisionnels de la Cedeao depuis le putsch.
Du côté de la junte, le nouveau ministre des Affaires étrangères, Joao Bernardo Vieira, a salué la rencontre et indiqué que les discussions se poursuivraient « pour trouver une solution le plus rapidement possible ».
Le Nigeria accorde l’asile politique à Fernando Dias
Dans le même temps, un nouvel élément est venu accentuer les tensions entourant la transition : le Nigeria a annoncé l’octroi de l’asile politique à Fernando Dias, principal opposant et candidat qui affirme avoir remporté la présidentielle interrompue.
Dias a assuré avoir échappé à une tentative d’arrestation le jour du putsch et accuse le président sortant Umaro Sissoco Embalo d’avoir « organisé » le renversement du processus électoral.
Abuja justifie sa décision par des « impératifs de paix et de stabilité régionale », réaffirmant son rôle historique de médiateur en Afrique de l’Ouest.
Embalo réfugié au Congo-Brazzaville
Le président destitué, brièvement arrêté lors du coup d’État puis exfiltré vers le Sénégal, a trouvé refuge au Congo-Brazzaville, où il est arrivé samedi « pour y rester », d’après une source proche de la présidence congolaise.
Un pays habitué aux crises politiques
La Guinée-Bissau, enclavée entre le Sénégal et la Guinée, est régulièrement secouée par les crises depuis son indépendance en 1974. Le pays a connu quatre coups d’État réussis et de multiples tentatives, sur fond de rivalités politiques, de fragilité institutionnelle et d’implication persistante des réseaux de trafic de drogue.
La junte justifie d’ailleurs sa prise de pouvoir par la découverte d’un « plan de déstabilisation » impliquant des barons de la drogue, dans un pays souvent qualifié de « narco-État » par certains analystes internationaux.
Un nouveau gouvernement de 28 membres, majoritairement composé de civils, a été installé par les militaires. Mais la pression régionale s’intensifie pour qu’un calendrier clair de retour à l’ordre constitutionnel soit établi, afin d’éviter une nouvelle crise prolongée dans cet État déjà marqué par l’instabilité chronique.
Thom Biakpa




