Les élections législatives ivoiriennes ont confirmé, sans surprise, l’hégémonie politique du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Deux mois après une présidentielle déjà largement remportée par Alassane Ouattara, le parti au pouvoir s’impose de nouveau, cette fois au Parlement, où il obtient une majorité qualifiée de rarement atteinte dans l’histoire politique récente du pays.
Selon la totalité des résultats provisoires publiés par la Commission électorale indépendante (CEI), le RHDP décroche 197 sièges sur 255, soit plus des trois quarts de l’Assemblée nationale. Cette progression significative par rapport à la précédente législature conforte la domination institutionnelle du camp présidentiel et réduit considérablement l’espace politique de l’opposition.
Une victoire nette dans un contexte de faible mobilisation
Cette performance électorale s’est toutefois déroulée dans un climat de participation limitée. Avec un taux de 35 %, la mobilisation des électeurs poursuit sa tendance à la baisse, déjà observée lors de la présidentielle d’octobre. L’abstention massive interroge sur la vitalité du débat démocratique, d’autant que les principaux leaders de l’opposition étaient absents du processus électoral, exclus des listes électorales.
Sur le terrain, le RHDP a une nouvelle fois démontré sa solidité dans le nord du pays, où il a enregistré des scores quasi unanimes. Plus significatif encore, le parti présidentiel a renforcé sa présence dans des régions historiquement acquises à l’opposition, notamment dans le sud et l’ouest, traduisant une recomposition progressive de la carte politique nationale.
Une opposition marginalisée
Face à cette machine électorale, l’opposition sort affaiblie. Le PDCI, longtemps pilier de la vie politique ivoirienne, voit sa représentation parlementaire divisée par deux, passant de 64 députés à 32 desormais. Quant au PPA-CI de Laurent Gbagbo, son choix du boycott se traduit par une disparition pure et simple de l’hémicycle. Les députés indépendants élus, pour la plupart issus de dissidences du RHDP, devraient quant à eux renforcer la majorité plutôt que la contester.
Si la CEI a validé la régularité globale du scrutin, certaines voix critiques évoquent des irrégularités et des incidents localisés. Ces accusations, récurrentes lors des scrutins ivoiriens, peinent toutefois à modifier le rapport de force politique issu des urnes.
La succession d’Ouattara en toile de fond
Avec cette nouvelle victoire, Alassane Ouattara consolide un pouvoir déjà solidement ancré : Sénat, collectivités locales et désormais Assemblée nationale sont largement contrôlés par son camp. À 84 ans, le chef de l’État a toutefois annoncé que son mandat actuel serait le dernier, ouvrant progressivement le débat sur sa succession.
Les scores spectaculaires obtenus par plusieurs figures clés du RHDP lors de ces législatives renforcent cette perspective. Vice-président, Premier ministre, ministres influents et président de l’Assemblée nationale se positionnent, chacun à leur manière, comme des acteurs centraux de l’après-Ouattara.
Pendant ce temps, l’opposition entame une phase d’introspection. Entre leadership fragilisé au PDCI et retrait annoncé de Laurent Gbagbo, le paysage politique ivoirien semble entrer dans une nouvelle ère, marquée par la domination du RHDP mais aussi par l’incertitude sur l’équilibre futur du jeu démocratique.
Thom Biakpa




