John Dramani Mahama et le Général Tiani/ Photo: Africapresse
Le président ghanéen, John Dramani Mahama, a récemment achevé une tournée au Mali, au Niger et au Burkina Faso, le 10 mars, au cours de laquelle il a souligné la « réalité irrévocable » de l’Alliance des États du Sahel (AES) et a plaidé pour sa « reconnaissance » par la Cédéao. Ses déclarations, qui reprennent le discours des dirigeants sahéliens alors que la Cédéao cherche à réintégrer ces pays, ont suscité de vives réactions. Quelles implications peuvent en découler ?
Selon plusieurs responsables de la Cédéao, cette initiative du président ghanéen n’engage que lui-même. Ils affirment que sa visite dans les trois pays de l’AES, qui s’est déroulée du 8 au 10 mars, n’a pas été concertée et a même provoqué des remous au sein de l’organisation. La Cédéao, qui s’est fixée un délai jusqu’en juillet pour convaincre le Mali, le Niger et le Burkina Faso de revenir dans son giron, n’a pas encore réagi officiellement aux propos de Mahama.
Lors de sa tournée, John Dramani Mahama a rencontré les dirigeants de l’AES après avoir rendu visite au président ivoirien Alassane Ouattara, sans mandat de la Cédéao, qui a désigné d’autres émissaires, à savoir les présidents togolais et sénégalais, pour engager le dialogue avec ces États récalcitrants.
Un chercheur, qui suit de près la situation, nuance en indiquant que la proposition de Mahama, entendue ces dernières semaines, pourrait refléter un changement d’orientation de la Cédéao. Plutôt que de chercher à réintégrer les trois pays, l’objectif pourrait être d’établir une coexistence pacifique. Ce « divorce amical » permettrait à l’AES de conserver certains privilèges de la Cédéao, une idée qui semble correspondre aux souhaits du président ghanéen, qui a exprimé son désir de « renforcer les liens et les relations entre ces deux regroupements » lors de son passage à Bamako.
Un diplomate ouest-africain, qui suit attentivement le dossier, ironise en affirmant que reconnaître l’AES serait aussi évident que de dire que « le soleil se lève à l’est ». Cependant, les militaires de l’AES aspirent à plus : ils souhaitent que l’AES soit reconnue comme une communauté économique régionale, au même titre que la Cédéao ou la SADC. Ce souhait est jugé irréaliste par ce diplomate.
Il analyse également les propos de Mahama sous deux angles. Sur le plan national, il semble vouloir se distancier de son prédécesseur, Nana Akufo-Addo, qui avait adopté une approche plus ferme envers les régimes militaires. Sur le plan international, Mahama pourrait chercher à s’imposer comme un intermédiaire privilégié, remplaçant le président togolais Faure Gnassingbé, afin de renforcer son influence sur le continent et d’ouvrir des débouchés économiques, notamment pour les ports ghanéens.
À ce jour, aucun chef d’État ouest-africain n’a réagi aux déclarations de John DramaniMahama.
Thom Biakpa