Le président camerounais Paul Biya, âgé de 92 ans, a prêté serment ce jeudi 6 novembre pour un huitième mandat consécutif, prolongeant ainsi un règne ininterrompu de plus de 43 ans. Sa réélection controversée du 12 octobre continue toutefois de plonger le pays dans un climat de tension politique et de méfiance populaire.
Une victoire officiellement à 53,66 %
Selon les chiffres publiés par le Conseil constitutionnel, Paul Biya aurait remporté le scrutin avec 53,66 % des suffrages. Mais son principal rival, Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre devenu figure de l’opposition, conteste fermement ces résultats et revendique lui aussi la victoire.
« Il y a désormais deux présidents : celui élu par le peuple camerounais, que je suis, et celui désigné par le Conseil constitutionnel, que vous connaissez », a-t-il déclaré mercredi sur ses réseaux sociaux.
Un pays sous tension
À la suite de la proclamation des résultats le 27 octobre, des manifestations sporadiques ont éclaté dans plusieurs villes du pays, notamment à Douala, Garoua et Bafoussam. Ces rassemblements, menés principalement par de jeunes partisans de l’opposition, ont été violemment réprimés par les forces de sécurité.
Le gouvernement a reconnu des « pertes en vies humaines », sans toutefois communiquer de chiffres ni de précisions sur les lieux ou les circonstances.
L’opposition traquée, la rue divisée
Depuis, Issa Tchiroma Bakary a lancé un appel à des « villes mortes » de lundi à mercredi, un mot d’ordre diversement suivi : fortement observé à Garoua et Douala, il l’a été beaucoup moins à Yaoundé, où les activités économiques et scolaires ont repris normalement.
La localisation actuelle de l’opposant demeure inconnue. Selon un de ses porte-parole, il serait « en mouvement ». Les autorités, elles, annoncent vouloir engager des poursuites judiciaires contre lui pour « appels répétés à l’insurrection ».
Inquiétudes internationales
L’International Crisis Group (ICG) a mis en garde contre un risque élevé d’aggravation des troubles, soulignant des incohérences dans les résultats officiels et des chiffres jugés « étonnants » par plusieurs organisations de la société civile.
Déjà fragilisé par la crise séparatiste anglophone, le Cameroun pourrait, selon l’ICG, entrer dans une nouvelle phase d’instabilité politique.
L’Union européenne, l’Union africaine et le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme ont pour leur part condamné la répression et appelé à l’ouverture d’une enquête indépendante sur les violences postélectorales.
Thom Biakpa




