Le duel Biya-Tchiroma aurait tourné à l’avantage du président sortant/ JA
Huit jours après la tenue de l’élection présidentielle au Cameroun, la Commission nationale de recensement des votes présidée par le magistrat Emile Essombe a achevé, lundi 20 octobre, la compilation des procès verbaux transmis par les commissions départementales des supervisions et ceux en provenance de la diaspora.
Ces documents selon plusieurs sources bien informées, donnent Paul Biya, le président sortant et candidat du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), largement vainqueur.
D’après les chiffres, le chef de l’État aurait recueilli 53,66 % des suffrages, soit 2 474 179 voix, devançant ainsi Issa Tchiroma Bakary, son principal adversaire.
Selon la même source, Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre et candidat à la tête d’une large coalition d’opposition, aurait obtenu moins de 36 % des voix, soit un écart de près de 800 000 voix avec le président sortant. Les autres candidats sont crédités de résultats bien plus modestes : Cabral Libi Li Ngue aurait obtenu entre 3 et 4 %, tandis que Maigari Bouba n’aurait pas franchi la barre des 3 %.
Des résultats fortement contestés
Mais ces chiffres sont loin de faire l’unanimité. Le principal challenger, Issa Tchiroma Bakary, rejette catégoriquement les résultats annoncés par la Commission. Dans une déclaration faite à la presse, il a dénoncé « une fraude électorale massive » et affirmé disposer de résultats compilés indépendamment, qui lui donneraient une victoire écrasante avec 80 % des suffrages.
« Nous ne reconnaissons pas ces chiffres fabriqués dans les bureaux du pouvoir. Les preuves que nous avons en main sont irréfutables : le peuple camerounais a massivement voté pour le changement », a martelé Issa Tchiroma Bakary.
Il appelle par ailleurs à une mobilisation nationale et internationale pour faire respecter, selon lui, « la volonté du peuple camerounais », laissant présager une possible crise post-électorale.
Une élection sous tension
Cette élection, marquée par un taux de participation modéré et des tensions dans plusieurs régions du pays, a une nouvelle fois mis en lumière les fragilités du système électoral camerounais. Des observateurs nationaux et internationaux avaient déjà exprimé leurs préoccupations concernant la transparence du scrutin, notamment dans certaines zones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, affectées par le conflit anglophone.
Si la Commission électorale nationale maintient que le processus s’est déroulé de manière régulière, l’opposition dénonce un système verrouillé, dans lequel les mécanismes de contrôle ne garantiraient pas l’équité du scrutin.
Vers un bras de fer post-électoral ?
À 92 ans, Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, semble une nouvelle fois prêt à entamer un mandat supplémentaire, renforçant sa position de doyen des chefs d’État africains en exercice. Mais les contestations actuelles, portées par un candidat aussi influent qu’Issa Tchiroma Bakary, pourraient marquer un tournant inédit dans le paysage politique camerounais.
La communauté internationale reste pour l’instant prudente, mais plusieurs chancelleries ont appelé au calme, tout en encourageant la transparence et le dialogue.
Thom Biakpa