Charles Blé Goudé a accordé, dans la soirée du 24 novembre, une longue interview à une chaîne de télévision privée ivoirienne. Un entretien dense, presque confessionnel, dans lequel le fondateur du COJEP revient sur les zones d’ombre de sa relation avec Laurent Gbagbo… mais surtout avec Nady Bamba, l’épouse de l’ancien chef de l’État. Son récit fait l’effet d’un séisme dans la scène politique ivoirienne.
Une loyauté affichée envers Gbagbo, malgré une relation fragile
Depuis leur libération par la CPI, les rapports entre Gbagbo et son ancien ministre de la Jeunesse restent distendus. Blé Goudé affirme pourtant n’avoir jamais voulu rompre le lien. Il présente même ses excuses à celui qu’il appelle encore son « mentor » si certains de ses propos ont été mal perçus, insistant sur sa volonté de rester utile à l’ancien président. Reste à savoir si cette profession de loyauté suffira à lever les soupçons qui le suivent depuis ses années de détention.
La crise du FPI, un foyer de méfiance durable
Une partie des tensions entre les deux hommes remonte à la période où ils étaient encore incarcérés. Blé Goudé reconnaît lors de l’entretien avoir demandé à son épouse de ne pas transmettre à Pascal Affi N’Guessan un message de Laurent Gbagbo lié à un document concernant la présidence du FPI. Cette décision avait provoqué l’ire de militants proches de Gbagbo, qui l’avaient accusé de trahison.
Le refus d’intégrer le PPA-CI, un choix lourd de conséquences
La transformation du COJEP en parti politique a ensuite accentué les fractures. Alors que plusieurs organisations ont fusionné dans le nouveau parti de Laurent Gbagbo, le PPA-CI, Blé Goudé a refusé d’y dissoudre son mouvement. Un geste interprété par certains comme une mise à distance, voire une rivalité ouverte.
Un épisode en prison impliquant Nady Bamba
Blé Goudé livre également un récit sensible concernant l’ancien siège du FPI, désormais occupé par le PPA-CI. Selon lui, cette propriété appartenait en réalité à Nady Bamba. Lors du conflit interne opposant Gbagbo à Affi N’Guessan, celle-ci aurait demandé à Affi de quitter les lieux. Gbagbo, embarrassé, aurait alors sollicité l’intervention de Blé Goudé pour tenter d’apaiser la situation.
Toujours selon son témoignage, Nady Bamba lui aurait promis une commission dans l’éventualité d’une vente de la maison. Il dit avoir refusé, estimant que l’ancien président, alors en détention, devait être préservé des querelles extérieures. À partir de cet épisode, les relations se seraient nettement détériorées, jusqu’à ce qu’il reçoive, par un intermédiaire, un message particulièrement hostile présenté comme venant de Nady Bamba.
Un parti sous influence ? Les accusations de Blé Goudé
L’entretien multiplie les révélations. Blé Goudé décrit un PPA-CI dominé par un cercle restreint proche de Nady Bamba. Selon lui, plusieurs anciens cadres historiques du FPI restent incarcérés, tandis que ceux qui gravitent autour de l’épouse de Gbagbo ont consolidé leur pouvoir, certains étant même candidats aux législatives. Il affirme aussi que Laurent Gbagbo envisageait de se retirer après ces élections, mais que son entourage aurait infléchi ce discours.
Un dialogue rompu malgré les démarches
Blé Goudé dit multiplier les tentatives pour revoir Gbagbo, sans obtenir de réponse. Il accuse également des cyberactivistes proches de l’entourage de l’ancien président de mener une campagne de dénigrement contre lui. Il se dit prêt à défendre ses déclarations devant la justice si Nady Bamba venait à les contester.
Retour sur un épisode de 2009
L’interview remonte enfin à une affaire plus ancienne : sa prise de position publique en faveur du désarmement des rebelles en 2009. Une déclaration qui, selon lui, lui valut une convocation au domicile de Nady Bamba, en présence de Gbagbo et de Guillaume Soro. Elle lui aurait demandé de s’expliquer, voire d’adresser des excuses à Soro.
Une relation politique sous tension
Cette sortie médiatique met en lumière une relation de plus en plus fragilisée entre Blé Goudé et son ancien mentor. Tout en exprimant sa volonté de rapprochement, son récit laisse transparaître un climat de suspicion généralisée, où le rôle et l’influence de Nady Bamba occupent une place centrale.
Thom Biakpa




