L’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo lors de son interview avec Alain Foka/ Capture d’écran
À quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, l’ancien président Laurent Gbagbo, dont la candidature a été rejetée, a exprimé des accusations graves à l’encontre du scrutin à venir. Dans une interview accordée à AFO Media, Gbagbo a qualifié le processus électoral de « coup d’État civil » et de « braquage électoral », arguant que le système est verrouillé en faveur du président sortant, Alassane Ouattara.
Laurent Gbagbo, 80 ans, a dénoncé l’exclusion de sa candidature, ainsi que celle de son allié de l’opposition, Tidjane Thiam. Le Conseil constitutionnel a justifié ces rejets par des raisons juridiques : pour Gbagbo, une condamnation liée à la crise post-électorale de 2010-2011, et pour Thiam, des questions de nationalité. Ces exclusions ont été interprétées par l’opposition comme une manœuvre orchestrée pour écarter ceux qui pourraient réellement gagner les élections.
Alors qu’Alassane Ouattara, âgé de 83 ans, se prépare à briguer un quatrième mandat, son parti affirme que tout se déroule dans le respect des normes constitutionnelles. Cependant, la réalité sur le terrain est marquée par des tensions grandissantes, avec quatre décès rapportés depuis la mi-octobre lors de manifestations réprimées par les forces de l’ordre. Plus de 700 personnes ont été arrêtées, certaines pour des actes qualifiés de « terrorisme », tandis qu’au moins 60 manifestants ont été condamnés à trois ans de prison ferme pour troubles à l’ordre public.
Malgré la gravité de la situation, Laurent Gbagbo se montre prudent dans ses déclarations. Bien qu’il manifeste son soutien aux manifestants en désaccord avec ce qu’il décrit comme un braquage électoral, il refuse d’appeler ses partisans à descendre dans la rue. Les partis politiques qu’il soutient, le PPA-CI et le PDCI de Tidjane Thiam, avaient initialement prévu des mobilisations, mais le gouvernement a interdit toute manifestation, invoquant des risques de violences. Cette prudence de l’opposition semble indiquer une volonté d’éviter une escalade des tensions, semblable à celle qui avait eu lieu lors de la crise de 2010-2011.
Laurent Gbagbo a également annoncé un tournant dans sa carrière politique, déclarant qu’il ne se présentera plus pour diriger son parti après les législatives de décembre. Il a précisé qu’il souhaite désormais se consacrer à l’écriture et à sa vie personnelle, tout en se refusant à soutenir l’un des quatre candidats encore en lice contre Ouattara. « On ne soutient personne. On ne soutient même pas la dynamique électorale », a-t-il affirmé.
Le climat politique en Côte d’Ivoire est donc marqué par une méfiance extrême, une défiance démocratique croissante, et une opposition qui se retrouve privée de ses figures majeures. À 48 heures du scrutin, la situation est préoccupante, et le risque de nouvelles violences demeure omniprésent.