Le Burundi fait face depuis début décembre à une situation sans précédent : des dizaines de milliers de Congolais, en fuite devant l’avancée du M23 dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), franchissent la frontière en nombre record. En une semaine seulement, plus de 40 000 personnes ont pénétré sur le territoire burundais, saturant les dispositifs d’accueil déjà fragilisés.
Un flux massif qui dépasse les capacités d’accueil
Depuis plusieurs mois, le Burundi accueille un nombre croissant de civils congolais fuyant les violences. Mais la semaine du 5 au 11 décembre a marqué un tournant. Selon le HCR, 40 000 nouveaux arrivants ont été enregistrés sur plusieurs points de passage, un niveau jamais atteint jusqu’ici.
Face à cette poussée migratoire, les autorités et les organisations humanitaires ont multiplié les ouvertures de sites de transit, notamment Kansega (zone Ndava, commune Bukinyana), Cishemere et Gatumba. Toutefois, ces infrastructures improvisées peinent à fournir les services de base.
Des conditions indignes : “Nous sommes livrés à nous-mêmes”
Dans ces camps surpeuplés, la précarité domine. La plupart des nouveaux arrivants n’ont ni eau potable, ni latrines, ni abris, et s’entassent sous des bâches improvisées.
Parmi eux, Fidèle Edimbe, 32 ans, originaire d’Uvira, raconte avoir fui après la mort de son petit frère lors des bombardements : « J’ai pris mes trois enfants et nous avons marché sans savoir où aller », confie-t-il.
Lors d’une visite effectuée le 11 décembre au site de Kansega, la représentante du HCR au Burundi, Brigitte Mukanga-Engo, a tiré la sonnette d’alarme. Tout en soulignant l’urgence humanitaire, elle appelle à une mobilisation internationale immédiate face au manque de ressources.
Pour tenter de désengorger les sites actuels, le HCR prévoit l’ouverture d’un nouveau camp à Bweru, dans l’est du pays. Le Burundi héberge déjà 71 000 réfugiés congolais, dont près de 18 000 dans le seul camp de Musenyi.
La crise humanitaire se double d’une menace sécuritaire
La brusque avancée des rebelles du M23, soutenus par l’armée rwandaise selon de nombreuses sources régionales, a poussé les autorités burundaises à prendre des mesures radicales.
Mardi, Bujumbura a annoncé la fermeture de sa frontière avec la RDC, après la prise d’Uvira par le M23 — une ville stratégique située à proximité de la capitale économique burundaise.
Les postes-frontières de Gatumba et Vugizo ont été placés sous statut de “zones militaires”, a confirmé un officier burundais cité par l’AFP. Cette décision souligne la crainte d’une extension du conflit sur le sol burundais.
Des tensions régionales ravivées
Déjà engagé militairement aux côtés de Kinshasa dans l’est de la RDC, le Burundi voit cette progression du M23 comme une menace directe. Les relations, historiquement tendues, entre Bujumbura et Kigali s’en trouvent encore compliquées, le Burundi accusant le Rwanda de soutenir le mouvement rebelle.
Cette combinaison d’instabilité sécuritaire et de pression humanitaire place aujourd’hui le Burundi dans une situation délicate, tandis que les combats se rapprochent dangereusement de ses frontières.
Thom Biakpa




