L’affaire avait brièvement ravivé les crispations sécuritaires au Sahel. Elle s’est finalement conclue par un geste d’apaisement. Les autorités burkinabè ont remis en liberté onze militaires nigérians retenus depuis plusieurs jours à Bobo-Dioulasso, à la suite d’un incident impliquant un avion de transport militaire du Nigeria.
Début décembre, un C-130 de l’armée de l’air nigériane avait été contraint d’effectuer un atterrissage non programmé dans le sud-ouest du Burkina Faso, officiellement en raison d’une défaillance technique. Si Abuja parlait d’un simple atterrissage de précaution, l’événement a immédiatement suscité la méfiance à Ouagadougou, dans un contexte régional marqué par une vigilance extrême autour des questions de souveraineté aérienne.
Les autorités burkinabè, soutenues par leurs partenaires du Mali et du Niger au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont interprété l’incident comme une possible entrée non autorisée dans leur espace aérien. L’AES est allée jusqu’à qualifier l’épisode d’« acte inamical », annonçant un relèvement du niveau d’alerte de ses systèmes de défense et rappelant sa doctrine de fermeté face à toute intrusion jugée illégale.
La tension est toutefois retombée après une intervention diplomatique de haut niveau. En mission spéciale à Ouagadougou, le ministre nigérian des Affaires étrangères, Yusuf Tuggar, a rencontré le président burkinabè Ibrahim Traoré. À l’issue de cet échange, Abuja a officiellement reconnu des manquements dans la procédure d’autorisation de survol et présenté ses excuses aux autorités burkinabè.
Cette reconnaissance a ouvert la voie à la libération de l’équipage et de l’appareil, confirmée par le ministère nigérian des Affaires étrangères. Le Burkina Faso a, de son côté, acté la fin de l’incident tout en réaffirmant son attachement strict au respect de son espace aérien.
Au-delà de l’épisode lui-même, cette affaire illustre le climat de suspicion qui entoure désormais les relations sécuritaires en Afrique de l’Ouest. Depuis leur retrait de la Cedeao en 2024, le Burkina Faso, le Mali et le Niger affichent une ligne dure sur les questions de souveraineté et de défense, face à des voisins restés au sein de l’organisation régionale, au premier rang desquels figure le Nigeria.
L’incident de Bobo-Dioulasso rappelle ainsi combien la moindre anomalie technique peut, dans le contexte sahélien actuel, se transformer en crise diplomatique — et combien les canaux politiques restent essentiels pour éviter l’escalade.
Thom Biakpa




