Au Mali, le général Assimi Goita sera très bientôt élevé au grade de Président de la République/ Photo: Bamada.net
Le Mali semble s’orienter vers une prolongation de sa période de Transition, avec un maintien des militaires au pouvoir sans élections. Les récentes « consultations » des « forces vives » du pays, orchestrées par les autorités de transition, se sont conclues le 29 avril. Dans la soirée, la Primature a publié les recommandations finales, qui incluent la dissolution des partis politiques et l’élévation du général Assimi Goïta au rang de président de la République pour une durée de cinq ans renouvelables.
Un changement de titre pour Assimi Goïta
Désormais, Assimi Goïta ne sera plus simplement le président de la Transition, mais le président de la République, à l’instar de ses homologues de l’Alliance des États du Sahel (AES). Ce changement de titre marque une étape significative dans la consolidation du pouvoir militaire au Mali, où les militaires sont au pouvoir depuis le coup d’État d’août 2020, soit presque cinq ans.
Pas d’élections avant la « pacification »
Les élections, régulièrement promises et repoussées depuis le coup d’État, ne se tiendront pas avant « la pacification du pays ». Le Mali est en proie à des conflits depuis plus de quinze ans, luttant contre des groupes jihadistes tels que le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (Jnim), lié à al-Qaïda, et l’État islamique au Sahel. De plus, le pays fait face à des rebelles indépendantistes du Front de libération de l’Azawad (FLA), suite à la rupture de l’accord de paix de 2015 par les autorités de transition elles-mêmes.
En attendant un retour à la paix, les « organes actuels » de gouvernance, notamment le Conseil national de transition (CNT) et le gouvernement de transition, resteront en place. Ces organes sont composés de personnalités nommées par les autorités de transition, remplaçant ainsi les députés élus.
Dissolution des partis politiques
Les consultations récentes avaient pour objectif officiel la relecture de la Charte des partis politiques. Cependant, les partis politiques craignaient une dissolution imminente, et cette crainte s’est concrétisée avec l’une des recommandations phares : la dissolution de tous les partis existants. Pour créer une nouvelle formation, une caution de 100 millions de francs CFA sera exigée, avec l’obligation d’avoir des représentations significatives dans les régions, les cercles et le district de Bamako, ce qui semble difficile sans élections.
De plus, les partis pourront être suspendus « en cas de trouble à l’ordre public », un motif souvent utilisé par les autorités de transition pour réprimer les voix critiques. D’autres mesures incluent la suppression du financement public des partis politiques, l’élimination du statut de « chef de file de l’opposition », et l’instauration d’un scrutin à un tour, probablement pour la présidentielle. Les candidats à la présidentielle devront également payer une caution de 250 millions de francs CFA, tandis que les chefs traditionnels, religieux et membres de la société civile seront interdits de candidature ou de participation à des campagnes électorales.
La légitimité de la Transition remise en question
Si ces recommandations sont adoptées, elles marqueront une pérennisation de la Transition sans élections, soulevant la question de la validité même du terme « Transition ». Les conclusions ont été transmises au général Assimi Goïta pour validation. Le Premier ministre de transition, le général Abdoulaye Maïga, a déjà exprimé que ces recommandations permettraient au pays d’avancer et de tourner la page sur des périodes sombres de son histoire.
Les partis politiques maliens, regroupés au sein de l’Initiative des partis politiques pour la Charte (Ipac), dénoncent ces consultations, les percevant comme une manœuvre des militaires pour s’accrocher au pouvoir et mettre fin à la démocratie sous couvert d’une légitimité populaire. Ils prévoient de se réunir pour discuter des prochaines étapes à suivre face à cette situation préoccupante.
La situation au Mali reste donc tendue, avec des implications profondes pour la démocratie et la gouvernance dans le pays. Les prochaines décisions des autorités de transition seront cruciales pour l’avenir politique du Mali et la stabilité de la région.
Thom Biakpa