Le Premier Ministre malien, Choguel Maiga entretient des relations tendues avec la junte au pouvoir/ photo: J.A
Les récentes déclarations acerbes du Premier ministre malien de transition, Choguel Maïga,continuent de provoquer des réactions vives et soulèvent des questions sur son avenir politique. Lors d’un discours le week-end dernier, il a critiqué les militaires au pouvoir, en particulier le report des élections, qu’il a qualifié de décision unilatérale et périlleuse. Bien que les militaires n’aient pas encore réagi, les organisations qui les soutiennent réclament son départ de la primature.
Choguel Maïga, qui n’est pas un novice en politique, semble jouer une carte risquée. Selon un ancien ministre, il cherche à se justifier devant l’opinion publique après avoir été écarté du pouvoir. Un politologue malien souligne qu’il nourrit des ambitions présidentielles et souhaite se dissocier des échecs de la Transition. Un opposant, quant à lui, le décrit comme un « joueur de poker » qui tente de créer l’événement, mais qui pourrait ne pas aller loin dans sa démarche.
En exprimant publiquement son indignation face au mépris des militaires qui l’ont pourtant nommé, et en critiquant le report des élections – qu’il avait initialement soutenu – Choguel Maïga semble avoir franchi une nouvelle étape. Certains le qualifient de « ridicule et courageux ». Un ancien ministre déclare : « Il critique le régime qu’il sert, ce qui n’est pas digne d’un homme d’État. S’il n’est pas satisfait, il est libre de démissionner ! » Cependant, il reconnaît également que Maïga n’a pas peur de s’exprimer, même au risque d’uneincarcération.
Tous les acteurs de la vie politique malienne s’accordent à dire que Choguel Maïga ne démissionnera pas de son propre chef. Au contraire, il semble vouloir se faire limoger pour se poser en victime et en défenseur des idéaux de la Transition. Cette stratégie est une question de survie politique pour lui, cherchant à maintenir sa crédibilité tout en se ménageant une porte de sortie.
Cependant, un politologue avertit que « l’on ne lui permettra pas de dicter l’agenda ». La révocation de Maïga entraînerait la dissolution du gouvernement, ce qui complique encore la situation. Les organisations pro-militaires, comme le Collectif pour la défense des militaires (CDM), accusent Choguel Maïga de « logique de déstabilisation » et de « haute trahison ». D’autres groupes, tels que l’Alliance pour la refondation du Mali (Arema), demandent sa révocation pour « faute grave ».
Choguel Maïga risque également des poursuites judiciaires. Un de ses collaborateurs, qui avait exprimé des critiques similaires, a été emprisonné pour « atteinte au crédit de l’État ». Ainsi, un limogeage ou une arrestation ne peuvent être écartés. Un universitaire malien évoque même la possibilité d’une résidence surveillée pour Maïga, soulignant que des actions judiciaires pourraient être engagées contre lui s’il est écarté, car il ne se taira pas.
Cette situation de conflit au sommet de l’État, déjà tendue depuis plusieurs mois, semble encore plus instable aujourd’hui. Pourtant, certains observateurs notent que Choguel Maïga a souvent su déjouer les pronostics. La question demeure : la limite a-t-elle été franchie cette fois-ci ? Le conseil des ministres prévu ce mercredi, auquel participeront le Président de Transition Assimi Goïta et Choguel Maïga, s’annonce particulièrement délicat.
Thom Biakpa