Le Mouvement GenZ 212 manifeste partout au Maroc / Maroc Hebdo
La contestation sociale s’intensifie au Maroc, alors que le Syndicat national de l’enseignement supérieur (SNESup) entre en grève pour 48 heures depuis mardi, en écho aux revendications portées par le mouvement citoyen GenZ 212. Les deux fronts dénoncent une série de réformes perçues comme menaçant les fondements de l’éducation publique et creusant davantage les inégalités sociales.
Au cœur de cette mobilisation, le projet de loi 59-24, actuellement en cours d’adoption, qui suscite de vives inquiétudes dans les milieux universitaires. Le texte, critiqué pour son orientation néolibérale, introduirait selon ses détracteurs une logique de marché dans le financement des universités publiques, au détriment de leur mission de service public.
« C’est un choix stratégique dangereux qui risque d’hypothéquer l’avenir de l’université marocaine et de la société pour des décennies », alerte Mustapha Azaitraoui, vice-secrétaire général du SNESup. « On lie le financement de l’université au secteur privé ; on transforme le droit à l’enseignement supérieur public en privilège réservé à celles et ceux qui peuvent payer. »
Le syndicat dénonce également un processus de réforme mené sans concertation, excluant la communauté universitaire. L’un des points les plus critiqués du projet est la création d’un conseil des administrateurs dominé par des membres externes nommés, ce qui remettrait en question l’indépendance académique et marginaliserait les instances élues représentant les enseignants, les étudiants et les personnels administratifs.
Une convergence inédite avec les revendications de la jeunesse
La mobilisation du SNESup entre en résonance avec les préoccupations exprimées depuis plusieurs semaines par le collectif GenZ 212, mouvement spontané et intergénérationnel né sur les réseaux sociaux. Les jeunes manifestants dénoncent les défaillances structurelles des services publics, notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé, et appellent à une transformation profonde du modèle social marocain.
« Au cœur des revendications des jeunes, aujourd’hui, se trouve l’exigence d’une école et d’une université publique capables de garantir à toutes et à tous l’égalité des chances, un enseignement de qualité et un horizon d’émancipation », affirme le SNESup, qui affirme son soutien aux manifestations.
Outre la réforme controversée, le syndicat pointe également le mauvais état des infrastructures universitaires, le manque criant de ressources humaines, ainsi que l’insuffisance des équipements pédagogiques, qui entravent le bon fonctionnement des établissements et nuisent à la qualité de l’enseignement.
Vers un jeudi de forte mobilisation
Le collectif GenZ 212, après une courte pause annoncée mardi pour réévaluer la situation et mieux structurer son action, appelle à des rassemblements de grande ampleur jeudi 9 octobre, à la veille de l’ouverture de la session parlementaire, moment institutionnel fort traditionnellement marqué par un discours du Roi Mohammed VI devant les deux Chambres.
Parmi ses principales revendications : la démission du chef du gouvernement, une refonte en profondeur du système éducatif et de santé, et des services publics accessibles et de qualité pour tous les citoyens.
Alors que la grogne monte, la conjoncture actuelle témoigne d’une prise de conscience sociale profonde, portée autant par la jeunesse que par les corps intermédiaires. La rencontre de ces mouvements autour de la défense de l’enseignement public pourrait marquer un tournant décisif dans le débat national sur l’avenir du modèle éducatif marocain.
Thom Biakpa