Emmanuel Macron face aux ambassadeurs français, le lundi 6 janvier/ photo: La Croix
Lors de l’ouverture de la trentième conférence des ambassadeurs, qui se tient à Paris les 6 et 7 janvier 2025, le président français Emmanuel Macron a affirmé que la France n’est pas en déclin sur le continent africain, mais qu’elle fait preuve de lucidité et se réorganise. Dans son discours, il a abordé la récente cessation de certains partenariats militaires en Afrique, déclarant : « Je pense que nous avons oublié de nous dire merci. Ce n’est pas un problème, cela viendra avec le temps. L’ingratitude, je le sais bien, est une maladie non transmissible. »
Les ambassadeurs français se réunissent à Paris pour deux jours d’échanges, sous la direction de Jean-Noël Barrot, ministre des Affaires étrangères, pour discuter de sujets variés tels que l’intelligence artificielle, les enjeux globaux et la diplomatie économique.
Macron a évoqué son récent voyage en Corne de l’Afrique et a fait référence au retrait des troupes françaises du Sénégal et du Tchad. « La France n’est pas en recul en Afrique, a-t-il réaffirmé. Elle est simplement lucide et se réorganise. Nous avons choisi de nous adapter, car il était nécessaire de le faire. Notre relation sécuritaire avait deux dimensions : d’une part, notre engagement contre le terrorisme depuis 2013, et d’autre part, la nécessité de répondre aux demandes des États souverains. Je crois que nous avons oublié de nous dire « merci ». Ce n’est pas grave, cela viendra avec le temps. »
Le président a également souligné que la France avait décidé de se retirer en raison de coups d’État et du changement de priorités de certains pays, qui ne considéraient plus la lutte contre le terrorisme comme une priorité. « À partir du moment où ces changements se sont produits, la France n’avait plus sa place. Nous avons alors proposé aux chefs d’État africains de réorganiser notre présence militaire. Nous avons été polis et leur avons laissé le soin d’annoncer cette réorganisation. Mais ne vous y trompez pas : il a parfois fallu les inciter à agir. Ce n’est pas parce que nous agissons avec courtoisie que cela doit être interprété comme un départ forcé de France d’Afrique. »
Emmanuel Macron a toutefois fait un clin d’œil à certains pays où la décision du retrait de l’armée française a été prise de manière douce et concertée : « Dans de nombreux pays, il n’y avait pas de désir d’éliminer l’armée française ou même de la réorganiser. Mais nous avons pris cette décision ensemble. C’est cela, le véritable partenariat », a-t-il indiqué.
Réactions virulentes du Sénégal et du Tchad
Suite aux déclarations d’Emmanuel Macron sur le retrait des troupes françaises d’Afrique, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko et le ministre tchadien des Affaires étrangères Abderaman Koulamallah ont vivement réagi. Sonko a contesté l’affirmation de Macron selon laquelle des négociations auraient eu lieu concernant le départ des soldats français du Sénégal, affirmant qu’aucune discussion n’avait eu lieu et que cette décision était le résultat de la volonté souveraine du Sénégal. Il a également critiqué l’idée d’une « ingratitude » des dirigeants africains, soulignant que la France n’avait ni la capacité ni la légitimité d’assurer la sécurité en Afrique, citant des exemples de déstabilisation, comme en Libye.
De son côté, Koulamallah a qualifié les propos de Macron d’attitude méprisante envers l’Afrique, appelant les dirigeants français à respecter le peuple africain et à reconnaître les sacrifices historiques de l’Afrique pour la France. Il a également souligné que la présence française au Tchad avait souvent servi des intérêts stratégiques sans véritable impact sur le développement local. Enfin, il a demandé à Macron de se concentrer sur les problèmes internes de la France.
Les dirigeants sénégalais et tchadiens rejettent ainsi les déclarations de Macron, affirmant leur souveraineté et critiquant la présence française en Afrique, tout en appelant à un respect mutuel et à une reconnaissance des sacrifices africains.
Thom Biakpa