Biram Senghor 86 ans, fils d’un tirailleur sénégalais, souhaite découvrir le lieu de sépulture de son père/ AFP
Quatre-vingts ans après les événements tragiques de Thiaroye, Biram Senghor, fils d’un tirailleur sénégalais, souhaite découvrir le lieu de sépulture de son père. Le 1er décembre 1944, l’armée coloniale française ouvrait le feu sur des soldats africains démobilisés au camp de transit de Thiaroye, en banlieue de Dakar, qui réclamaient le paiement de leur solde. Parmi les victimes, M’Bap Senghor fut tué ce jour-là pour avoir exigé ce qui lui était dû. Huit décennies plus tard, son fils, aujourd’hui âgé de 86 ans, reste dans l’ignorance quant à l’emplacement de la tombe de son père.
Le lundi 23 juin 2025, il a déposé une plainte contre X et l’État français devant le tribunal judiciaire de Paris, pour recel de cadavre. En juin dernier, la France a accordé à M’BapSenghor la mention « Mort pour la France », neuf ans après son décès. En novembre, Paris a également reconnu le terme « massacre » pour qualifier cet acte colonial.
Cependant, plusieurs historiens soulignent que cette reconnaissance officielle demeure partielle. Les documents français recensent 35 morts, tandis que certains travaux estiment le nombre de victimes à plus de 400. Le lieu de sépulture de ces soldats continue d’être entouré de mystères.
« Il faut qu’ils nous disent où se trouve le cadavre », insiste Maître Dieng, l’avocat de BiramSenghor, qui espère que les autorités françaises fourniront des informations sur la localisation des dépouilles, convaincu qu’il existe des documents susceptibles de les éclairer. La loi française, notamment l’article 434-7 du Code pénal, punit quiconque contribue à masquer la découverte d’un cadavre.
Au départ, les autorités avaient qualifié son père de déserteur. Bien que cette qualification ait été révisée pour reconnaître qu’il avait été tué à Thiaroye, des déclarations antérieures indiquaient qu’il pouvait y avoir des fosses communes et des tombes pour les tirailleurs. En 2014, l’ancien président François Hollande a affirmé qu’il n’y avait personne dans ces tombes, laissant planer le doute sur le sort des tirailleurs.
La reconnaissance du massacre implique l’usage de la violence, et la loi française sanctionne quiconque dissimule un cadavre résultant d’une violence. La plainte pour recel de cadavre vise à établir des responsabilités dans cette affaire, en s’adressant à l’ancienne puissance coloniale qui a géré ce dossier.
En réponse aux préoccupations, François Hollande avait déclaré, lors d’une visite en 2014, avoir remis l’intégralité des archives concernant Thiaroye. Une source gouvernementale française a récemment affirmé que « la France a fait tout ce qu’elle devait faire » et que « les archives sont ouvertes ».
Thom Biakpa