Connu comme un farouche opposant au régime militaire dirigé par Mahamat Idriss Déby Itno (fils d’Idriss Déby Itno), Succès Masra a été nommé, ce lundi 1er janvier 2024, premier ministre, chef du gouvernement de transition au Tchad. L’on se souvient que le 20 octobre 2022, après la répression sanglante des manifestations auxquelles avait pris part sa formation politique Les Transformateurs, il avait été contraint de prendre le chemin de l’exil.
Toutefois, revenu au Tchad au mois de novembre dernier, il a opté pour un virage à 360° en se rangeant désormais derrière le régime militaire au pouvoir. Un retournement de veste qui trouve son fondement dans un accord de réconciliation signé avec le pouvoir du président de transition. Cette attitude de l’ex-opposant n’a pas été du goût des membres de l’actuelle opposition qui avaient qualifié cet accord de « dupes ».
Ce pacte en effet, prévoit une « amnistie générale » des responsables des meurtres de manifestants le 20 octobre 2022. Un acte d’impunité qui ne passe pas du côté de l’opposition. Ce jour là, plusieurs milliers de manifestants étaient descendus dans les rues de la capitale, N’Djamena, et de plusieurs villes de province pour protester contre la prolongation de la transition militaire commencée au lendemain de la mort du président Idriss Déby Itno. A l’issue de cette journée mouvementée, le pouvoir annonçait une cinquantaine de manifestants tués tandis que l’opposition et les ONG parlaient de plus de 300 morts.
Succès Masra, considéré à cette période, par le pouvoir comme le principal responsable du soulèvement d’octobre 2022, avait été la cible de poursuites engagées par le régime pour « tentative d’atteinte à l’ordre constitutionnel » et « incitation à un soulèvement insurrectionnel ». Mais l’accord passé entre N’Djamena et le patron des Transformateurs avait permis la levée du mandat d’arrêt international émis le 8 juin contre lui par la justice de son pays.
Depuis lors, Succès Masra file le bon coton avec le régime militaire. Il a même appelé à voter « oui », lors du référendum constitutionnel du 17 décembre 2023, qui a consacré l’adoption du texte considéré comme une étape clé vers le retour au pouvoir des civils au terme d’une élection promise par la junte à fin 2024.
Ce référendum constitutionnel voulu par le président de transition, Mahamat Idriss Déby Itno, a été approuvé avec 86 % des voix et un taux de participation à 63,75 %. Des résultats contestés par une partie de l’opposition, qui avait appelé à boycotter le scrutin.
Sa nomination à la tête du gouvernement tchadien, n’est que la juste récompense de sa collaboration avec l’homme fort de N’djamena.
Thom Biakpa