Le cacao ivoirien fait face à un gros trafic / Photo: Getty Images
La Côte d’Ivoire, véritable bastion de la production de cacao, s’impose comme le leader mondial de l’or brun depuis plus de quarante ans. Des plantations luxuriantes du Tonkpi aux forêts verdoyantes de la Nawa, ce pays ouest-africain vit au rythme des récoltes cacaoyères, faisant de cette culture un pilier essentiel de son économie. Cependant, cette success story est aujourd’hui menacée par un phénomène inquiétant : le trafic transfrontalier de fèves.
Un trafic qui ronge l’économie
D’après les informations rapportées par l’agence Reuters, la campagne cacaoyère 2024/2025 s’annonce particulièrement tumultueuse. La flambée des prix mondiaux, qui a doublé depuis septembre dernier, a créé une situation explosive. Bien que le gouvernement ivoirien ait instauré un prix officiel fixe pour protéger la filière, la réalité sur le terrain est tout autre. En Guinée, les prix du cacao s’envolent, attirant irrésistiblement les trafiquants.
L’agence de presse internationale souligne qu’une part significative de la production a déjà franchi illégalement les frontières depuis octobre 2024, avec pour destination finale l’Asie, en passant par le Libéria et la Guinée. Dans les zones frontalières, les trafiquants ont établi un système bien rodé, offrant aux producteurs des primes attractives dépassant le prix officiel. Ce trafic illégal s’est durablement ancré dans les régions frontalières, alimenté par un réseau sophistiqué de complicités au sein même des administrations locales.
Une riposte déterminée
Face à cette situation alarmante, l’État ivoirien a décidé de réagir avec fermeté. Le 14 janvier 2025, cinq hauts fonctionnaires ont été suspendus avec effet immédiat, parmi lesquels le préfet, le chef du bureau des douanes, le commissaire de police, le commandant de brigade et le chef du détachement des forces armées. Cette décision spectaculaire met en lumière l’ampleur de la corruption qui gangrène l’administration locale.
Au-delà du trafic, le secteur cacaoyer ivoirien doit également faire face à des défis structurels majeurs. Les changements climatiques menacent les rendements, tandis que les nouvelles réglementations internationales imposent des normes de durabilité de plus en plus strictes. La traçabilité des produits devient un enjeu crucial, surtout avec l’entrée en vigueur de législations européennes rigoureuses sur la déforestation.
Une stratégie globale pour l’avenir
Pour protéger son précieux cacao, la Côte d’Ivoire met en œuvre une stratégie multifacette. En plus des sanctions administratives, le pays s’engage dans la modernisation de sa filière : digitalisation de la traçabilité, renforcement des contrôles aux frontières et amélioration de la coordination avec les pays voisins. Des discussions sont également en cours pour harmoniser les prix au niveau régional, afin de réduire les incitations au trafic.
En somme, la Côte d’Ivoire, tout en continuant à revendiquer son statut de premier producteur mondial de cacao, doit faire face à des défis complexes. La lutte contre le trafic de cacao et la mise en place de mesures durables sont essentielles pour préserver l’avenir de cette culture emblématique et garantir la prospérité économique du pays.
Thom Biakpa