Le gynécologue congolais Denis Mukwege devant le parlement européen/ AFP
Mercredi matin, le docteur Denis Mukwege, lauréat du Prix Nobel de la paix et du Prix Sakharov, a pris la parole devant les députés européens à Strasbourg pour tirer la sonnette d’alarme sur la situation alarmante en République Démocratique du Congo (RDC). Reconnu pour son engagement en faveur des droits humains, Mukwege a exposé des chiffres tragiques qui illustrent l’ampleur d’un conflit qui a causé la mort de six millions de personnes, le qualifiant de « guerre négligée et oubliée par le monde occidental ».
Dans son discours, le médecin a souligné que 26 millions de Congolais vivent dans une insécurité alimentaire totale, tandis que 7,8 millions de personnes sont déplacées à l’intérieur du pays. Il a également révélé des statistiques choquantes, affirmant qu’une femme est violée toutes les quatre minutes en RDC. Ces réalités désolantes témoignent de l’urgence d’une intervention internationale pour mettre fin à des décennies de violence et d’instabilité.
Mukwege a mis en lumière la situation actuelle dans l’est de la RDC, où des territoires vastes, notamment Goma et Bukavu, ont été conquis par les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. Il a plaidé pour des négociations à dimension internationale, soulignant que seule une approche globale pourrait conduire à une solution durable pour le pays.
Le gynécologue a également évoqué les récentes négociations entre le Rwanda et la RDC, ainsi qu’un accord de principe signé fin avril à Washington sous l’égide des États-Unis. Cet accord pourrait ouvrir la voie à un cessez-le-feu immédiat et à une aide au retour des réfugiés, mais Mukwege a exprimé des réserves quant à la partie économique de l’accord, qu’il juge « trop opaque ».
Les discussions en cours portent principalement sur les ressources naturelles congolaises, notamment le cobalt et le tantale, des minerais très convoités. Mukwege a averti que la co-gestion des ressources naturelles entre les deux pays pourrait être « une graine de conflit », affirmant qu’il est inconcevable de demander à deux États en conflit, ayant des millions de morts sur la conscience, de gérer ensemble ces ressources sans aborder la question de la justice.
Appelant à une discussion internationale inclusive, Mukwege a exhorté l’Europe à s’impliquer activement dans les négociations. Il a souligné que, pendant ce temps, les États-Unis, sous l’administration de Donald Trump, semblent favoriser un accord qui faciliterait l’accès de leurs entreprises aux matières premières de la région des Grands Lacs, ce qui pourrait compliquer davantage la situation.
L‘intervention de Denis Mukwege au Parlement Européen met en lumière la nécessité d’une action concertée et urgente pour répondre à la crise humanitaire en RDC. Son appel à la justice et à une gestion équitable des ressources naturelles résonne comme un cri de ralliement pour tous ceux qui aspirent à un avenir pacifique et prospère pour le peuple congolais.
Thom Biakpa