Le chef de l’opposition kenyane, Raila Odinga, est décédé, mercredi matin à 80 ans dans le sud de l’Inde./ Wikipédia
Le Kenya est en deuil. Raila Odinga, le leader charismatique de l’opposition, est décédé, ce mercredi 15 octobre à l’âge de 80 ans en Inde, des suites d’un arrêt cardiaque, comme l’ont confirmé ses proches. Surnommé affectueusement « Baba » par les Kenyans, Odinga a été une figure emblématique de la lutte pour la démocratie et les droits de l’homme dans son pays, engagé depuis les années 1980 contre la dictature de Daniel Arap Moi.
Un parcours marqué par l’engagement
Raila Odinga a consacré sa vie à la lutte politique, un engagement qui lui a coûté cher. Sous le régime de Moi, il a passé près de huit ans en prison, confronté à la répression et à la violence politique. Au fil des ans, il a tenté à cinq reprises de conquérir la présidence, remettant en question la fiabilité des élections et dénonçant les fraudes. Son combat pour la justice électorale a parfois conduit à des affrontements tragiques, notamment lors des élections de 2007, où la réélection de Mwai Kibaki a engendré une crise postélectorale meurtrière, faisant plus de 1 100 victimes.
Malgré ces défis, Odinga a su transformer la douleur en espoir, et sa nomination en tant que Premier ministre a été perçue comme une reconnaissance de son rôle dans la politique kenyane.
Un héritage progressiste
L’un des legs les plus significatifs de Raila Odinga est la Constitution de 2010, dont il a été un fervent architecte. Ce texte est considéré comme l’une des plus progressistes d’Afrique, intégrant des réformes importantes pour renforcer la démocratie et les droits civiques au Kenya. Sa vision politique, axée sur la justice sociale et l’égalité, a inspiré de nombreuses générations de Kényans.
Hommages et réflexions
Depuis l’annonce de son décès, une vague d’hommages a afflué, témoignant de l’impact qu’il a eu sur la société kenyane et au-delà. David Maraga, ancien président de la Cour suprême, a salué Odinga comme « un patriote, un panafricaniste et un démocrate » sur le réseau social X. Le défenseur des droits de l’homme, Boniface Mwangi, a également exprimé son chagrin, déclarant que cela marquait « la fin de sa vigilance », tandis que le président de la Commission de l’Union africaine a loué son engagement en faveur de la démocratie.
Un tournant controversé
Cependant, le parcours de Raila Odinga n’a pas été exempt de controverses. Après une mobilisation anti-gouvernementale menée par la génération Z en juin 2024, qui a été violemment réprimée, Odinga a choqué certains de ses partisans en rejoignant un gouvernement d’union nationale. Ce choix a engendré des critiques, certains estimant qu’il avait trahi les idéaux qu’il avait défendus toute sa vie. Devenu le candidat de William Ruto à la présidence de la Commission de l’Union africaine, Odinga a été perçu par certains comme un compromis à la politique kenyane.
En somme, le décès de Raila Odinga marque la fin d’une ère dans la politique kenyane. Son combat acharné pour la démocratie, bien qu’entaché de controverses, laisse un héritage indélébile. Alors que le Kenya pleure la perte de l’un de ses leaders les plus emblématiques, il est indéniable que Raila Odinga a façonné le paysage politique du pays et inspiré des millions de Kényans dans leur quête de justice et d’égalité. Sa mémoire perdurera dans les luttes à venir pour un Kenya plus juste et démocratique.
Thom Biakpa